La Commission électorale nationale indépendante (CENI) a procédé, jeudi 30 mars 2023 à une nouvelle prolongation de la période d’identification et d’enrôlement des électeurs dans la troisième aire opérationnelle « AO3 ». Cette période qui est de 10 jours ira du 2 au 11 avril 2023 dans le but de permettre aux requérants n’ayant pas encore obtenu leurs cartes d’électeurs de se faire enrôler et s’inscrire sur la liste électorale.
Dès le début de cette opération, le 16 février 2023, les territoires de Rutshuru et Masisi mais également le Nord du territoire de Nyiragongo dans la province du Nord-Kivu dont plusieurs de leurs localités sont restées sous contrôle des rebelles du M23/RDF n’ont pas été associés à ces opérations de révision du fichier électoral.
Quelques jours après le démarrage de ce processus, et ce, grâce aux multiples plaidoyers des acteurs sociopolitiques, la centrale électorale avait procédé au lancement de l’opération d’enrôlement des électeurs en faveur des déplacés de Rutshuru, Masisi et Nyiragongo installés dans divers sites au Nord et à l’Ouest de la ville de Goma y compris les déplacés de Kiwanja, des groupements Mutanda et Bambo cantonnés dans la cité et la commune de Kanyabayonga, à la limite Sud du territoire de Lubero.
Les mêmes plaidoyers ont abouti, en février dernier, au lancement de l’identification et l’enrôlement des électeurs dans la cité de Kanyabayonga, en localité Bitongi, dans le groupement de Kanyabayonga. Cette entité de Rutshuru n’a jamais été affectée par la guerre du M23/RDF.
Des risques, et des risques de perdre des sièges… !
Des milliers d’habitants de Rutshuru, Masisi et d’une partie du Nyiragongo sont privés de l’enrôlement des électeurs. A quelques jours de la clôture de ces opérations, la CENI n’a toujours pas pris des mesures idoines afin de s’assurer de l’enrôlement de tous les citoyens majeurs restés dans les zones conquises par les rebelles du M23. Même des entités qui n’ont jamais été assiégées par le M23/RDF ne connaissent pas cet enrôlement des électeurs.
C’est le cas de Vitshumbi, cette localité située sur la cote Ouest du lac Edouard dans le groupement Kanyabayonga. Plusieurs centaines de déplacés ont afflué dans cette entité pour se mettre à l’abri de la menace rebelle. Et malgré le calme dans la zone, les habitants sont privés de l’enrôlement des électeurs ainsi que les déplacés qui y sont accueillis depuis nombreux mois. La même situation sévit dans les entités de Birundule et Bulindi dans la même entité coutumière.
Le territoire voisin de Nyiragongo, dans sa partie Nord, est écarté des opérations d’enrôlement des électeurs. Ce, après que les groupements Buhumba et Kibumba ont été directement affectés par la guerre du M23/RDF. A Masisi centre, à Sake et dans les localités de Nyabiondo, Lushebere,…dans le territoire de Masisi, les habitants ne s’enrôlent pas faute de déploiement des kits électoraux dans la région. Ce territoire est aussi touché par la guerre du M23/RDF.
Une session spéciale d’enrôlement des électeurs à Rutshuru, Masisi et Nyiragongo, un impératif ?
Depuis le début des opérations d’enrôlement et d’identification des électeurs dans la Troisième aire opérationnelle (AO3), la Commission électorale nationale indépendante (CENI) n’a fait aucune communication au sujet de l’enrôlement des habitants qui sont restés dans leurs villages et localités lors des combats opposant les rebelles du M23/RDF aux forces régulières congolaises. Seuls, les déplacés s’enrôlent dans certains sites. Il s’agit notamment de ceux cantonnés à Kanyaruchinya, en territoire de Nyiragongo près de Goma et dans la cité de Kanyabayonga, en groupement Mutanda, dans le territoire de Rutshuru.
Le Président national du parti politique Démocratie chrétienne fédéraliste Nyamwisi (DCF-N) plaide pour l’organisation d’une « session spéciale » d’enrôlement des populations civiles, restées dans ces entités sous contrôle des rebelles du M23/RDF à Rutshuru, Masisi et Nyiragongo.
A en croire Simon Muhayirwa Kazungu, nombreux habitants des territoires affectés par la guerre d’agression rwandaise sont écartés du processus de révision du fichier électoral faute de déploiement des kits d’enrôlement dans leurs milieux respectifs en proie à l’insécurité. Il estime, à cet effet, que la CENI ne doit pas limiter les opérations d’enrôlement des électeurs aux sites des déplacés pendant que nombreux autres civils, éligibles à ces opérations de la RFE (Révision du fichier électoral) restent dans les zones occupées par les M23/RDF, ignorant leur sort.
« Nous avons un sérieux problème au Nord-Kivu. Nous avons nos compatriotes qui sont dans le Masisi, Rutshuru et Nyiragongo, et qui sont dans les entités sous occupation du Rwanda avec ses supplétifs du M23, on doit penser à ces gens là, parce qu’ils sont aussi des Congolais, ils ont droit à leurs cartes d’électeurs, ils ont aussi surtout droit, de se choisir leurs représentants. Tout le monde de ces territoires n’est pas dans les sites de déplacés », a-t-il déclaré au sortir d’un centre d’inscription le 16 mars dernier, en ville de Butembo.
Le mercredi 29 mars dernier, le député national Jean-Baptiste Kasekwa a exprimé son inquiétude de voir la province du Nord-Kivu perdre 23 sièges au parlement national. L’élu de Goma metait en avant des contraintes d’accès à la carte d’électeur et le climat sécuritaire délétère dans plusieurs territoires de la province. Devant la crème intellectuelle de Butembo, il a exprimé le vœu de voir la CENI reconduire les statistiques de 2018 pour les territoires de Rutshuru, Masisi et Beni, secoués par l’insécurité, ce, dans l’objectif de leur éviter de perdre des sièges à l’Assemblée nationale.
En province du Nord-Kivu, les opérations d’enrôlement et d’identification des électeurs se déroulement effectivement dans les territoires de Lubero, Walikale, Beni et dans les villes de Goma, Butembo et Beni en dépit des mouvements des populations dans certains coins de Lubero et Beni territoire suite à l’activisme des ADF et groupes armés locaux. Au-delà de cette contrainte sécuritaire, des irrégularités techniques ainsi que le manque de performance dans le chef de certains agents temporaires de la CENI sont décriés par les requérants.
Dieu-Merci Mumbere & Didy Vitava